un travailleur va modifier son comportement à partir d'un évènement positif
Facteurs humains & neurosciences

Et si le positif impactait plus nos comportements que le négatif ?

Cet article s’appuie sur la publication de Stefano Palminteri, directeur de recherches au laboratoire de neurosciences cognitives et computationnelles de l’Ecole normale supérieure et prix Ribot 2022 de psychologie scientifique. Découvrez comment notre cerveau nous pousse à privilégier les informations positives plutôt que les négatives pour ajuster notre comportement

un travailleur va modifier son comportement à partir d'un évènement positif
Vers une HSE positive

Notre cerveau nous joue des tours

Croire aujourd’hui que les décisions que nous prenons sur notre lieu de travail résultent d’une analyse rationnelle et objective est erroné.

En réalité, l’individu a tendance à tenir compte des informations positives plutôt que les négatives pour ajuster son comportement notamment sur son poste de travail. C’est ce que l’on appelle le biais d’optimisme.

Ce raccourci de pensée est très souvent lié au biais de confirmation où l’on privilégie les informations qui confirment nos croyances préalables (il s’est coupé malgré le fait qu’il portait des gants ce qui prouve que les gants ne servent à rien) sans prendre en compte les accidents évités grâce au port des gants.

Les deux biais peuvent également agir sur l’interprétation des indicateurs d’accidentologie : cela consiste à ne pas croire que les accidents survenus dans une autre équipe puissent nous arriver un jour.

D’après des recherches récentes, le positif impactait plus nos comportements

Les chercheurs ont découvert que les réseaux neurologiques dédiés à l’apprentissage suivent deux voies : la voie directe liée à la confirmation de ce que je crois (prédiction positive), l’autre voie indirecte correspondant à un écart à l’attendu (prédiction négative). Les deux voies permettent théoriquement de développer à part égales ses connaissances et progresser. Or il apparait que la dopamine associée au processus d’apprentissage, privilégie la prise d’informations en faveur des éléments encourageants (voie directe) au détriment de la seconde.

Prenons deux exemples : Martin reçoit un nouveau modèle de marteau. Le responsable HSE indique que celui-ci est plus léger et amorti mieux les chocs mais Martin est sceptique car habitué à son ancien marteau. A l’issue de la journée de travail, les essais réalisés par Martin ne montrent aucune différence. Martin possède bien une douleur au coude mais il ne l’impute pas au vieux marteau. Le résultat est inférieur à ses attentes, il ne changera donc pas ses habitudes (taux d’apprentissage nul).

David travaille régulièrement avec Gérard le grutier. Ce dernier lui fait remarquer que s’il portait un gilet à haute visibilité ce serait efficace pour traiter plus rapidement ses demandes. A la fin de la journée Gérard le félicite car ils ont gagné 1/2h sur le temps estimé des travaux. Le résultat est supérieur aux attentes de David qui va adopter dorénavant le port du gilet (taux d’apprentissage maximal).

Privilégier les informations positives plutôt que les négatives pour ajuster notre comportement

Dans ces deux exemples, nous illustrons le fait que les individus sont moins attentifs aux informations qui indiquent qu’ils ont fait un mauvais choix. Le cerveau de Martin persiste dans l’erreur car il prend en compte une information négative (je ne perçois pas de différence entre les deux outils) jusqu’au jour ou il sera en incapacité de travailler.

En revanche dans le cas de David, le circuit d’apprentissage par récompense a modifié sa manière de faire. Les biais d’optimisme et de confirmation ont joué en faveur de la santé sécurité au travail. La carotte a plus de pouvoir que le baton.

Cela démontre également les limites des méthodes pédagogiques s’appuyant sur des images chocs (accidents graves…). Si l’objectif visé consiste à modifier les manières de faire, l’apprentissage par punition n’obtiendra pas les effets escomptés et restera au niveau de la simple « information ». La peur non liée à un évènement vécu a moins de chance de servir de leçon.

HSE nouveau modèle

Il s’agit donc en santé sécurité au travail, de compléter la vision traditionnelle de la sécurité (focus sur les dysfonctionnements, les TF, TG…) par l’analyse détaillée des situations dans lesquelles tout se passe bien. Mikael Mourey ancien directeur santé sécurité parle d’un nouveau modèle définissant l’HSE de façon positive.

C’est aussi la vision portée par le Professeur Danois Erik Hollnagel. Le travailleur contribue à la sécurité et il faut identifier les actions qui facilitent la réussite. On s’améliore en comprenant pourquoi dans certains cas tout se passe du mieux possible. Une fois que l’on a compris les raisons du succès, le responsable communique aux autres travailleurs la voie à suivre.

Chez Aforma Conseil, nous avons choisi de changer les manières de penser des stagiaires de tous niveaux en expliquant le « pourquoi » des situations de travail qui fonctionnent. L’ancrage au travers de plusieurs sessions courtes permet de s’affranchir de la courbe de l’oubli pour modifier progressivement et durablement les manières de faire du collectif tout entier.

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Mon expérience d'ingénieur prévention à bord des sous-marins puis du porte-avions Charles de Gaulle m'a inculqué une méthode de gestion des risques. J'ai complété ce parcours avec 8 années dans l'industrie navale avant de créer mon propre organisme de formation.

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